Les 23 et 24 septembre derniers, 75 personnes étaient réunies à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) pour la première édition des « Journées de la politique internationale ». Centrée sur les enjeux de coopération et de solidarité, cette initiative de la FSGT illustre le positionnement spécifique de la Fédération sur ces sujets, en appui sur des valeurs d’émancipation et de culture de paix.
« Je suis arrivé inquiet, je repars enthousiaste. Je redécouvre la Fédération culturellement parlant, avec des actions collectives, avec des étudiants, avec des collectivités. C’est la nouvelle FSGT, elle n’est pas repliée sur elle-même. » Avec ces mots très forts, René Moustard, coprésident de la Fédération de 1976 à 1999, résume assez bien les premières « Journées de la politique internationale » qui étaient organisées par le Domaine de la Politique de coopération et de solidarité internationales de la FSGT à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) les 23 et 24 septembre derniers.
Deux journées inédites de par la richesse des contenus proposés et la diversité des acteurs et des actrices impliqué·es qui font des projets internationaux de la Fédération une source unique de coopération dans le mouvement sportif…
Dès l'ouverture, Jean-Yves Fauchon et Jamil Kadi, coordonnateurs du Domaine de la politique de coopération et de solidarité internationales de la FSGT introduisent une première table ronde riche d’enseignements sur l’intérêt de s’ouvrir à l’international pour un club ou un Comité de la Fédération.
Conseiller technique sportif placé auprès de la Fédé par le Ministère des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques, Jacques Callarec témoigne, lui, de l’accueil dans les Comités et les associations de vélo FSGT d’une équipe de cyclistes palestiniens l’été dernier. Mis en avant dans le numéro d’août-septembre 2022 de Sport et plein air, ce véritable tour de France, certes quelque peu perturbé par le Covid-19 en milieu de séjour, a suscité un véritable engouement. En effet, sans aucune expérience internationale, pas moins de treize Comités ont su répondre présents et mobiliser leurs clubs !
De son côté, Mounia Mahfoufi du Comité du Val-de-Marne présente la dimension internationale de la Vivicittà, une course pour la paix organisée dans plusieurs villes à travers le monde et dont celles de Vitry et d’Ivry-sur-Seine. Elle montre aussi comment le partenariat avec une association française et des associations de la Fédération a permis d’accueillir deux clubs de Kabylie, Izi el Korn et Ait Issad, pour participer à l’événement et à ces derniers de recevoir, à leur tour, des sportifs et des sportives de la FSGT.
Enfin, dans les groupes de travail, Clément Rémond, coprésident du Comité de Seine-Saint-Denis évoque l’initiative internationale Erasmus + mise en place avec des jeunes de 14 à 17 ans, notamment pour alimenter les réseaux locaux de coopération et donner du sens au développement.
Un espace interculturel de pratiques
« Être réfugiée et être accueillie comme tout le monde. » Sportive, basketteuse et réfugiée en France, Carine Aloumon ne peut plus se rendre dans son pays, le Togo, et révèle le rôle que Sportis, association toulousaine affiliée à la FSGT, où elle est désormais bénévole, a joué pour son accueil et son inclusion.
Il ne peut pas y avoir de sport pour tous et toutes dans une société qui n’est pas pour tou·tes ! Femmes, réfugié·es, personnes en situation de handicap ou peuples occupés, les inégalités d’accès au sport sont à l’image des inégalités structurelles présentes dans la société. S’investir dans une action internationale de solidarité est ainsi, pour un club ou un Comité de la Fédération, une opportunité pour développer ses propres pratiques dans un autre contexte et surtout rester connecté aux enjeux sociétaux de lutte contre les inégalités et les discriminations. Exemple avec Yohan Massot de la FSGT 93 qui, dans le cadre d’une formation de jeunes dirigeant·es, a construit un projet de pratiques partagées handi-valides en Palestine et en France.
Dirigeante du Snep-FSU (Syndicat national d’éducation physique-Fédération syndicale unitaire) investie dans les initiatives de la Fédé avec la Palestine, Claire Pontais pose, elle, la nécessité d’un socle commun de valeurs :
« Le sport est un élément de partage et de culture. Il doit nous aider à partager avec le grand public les enjeux de sport et de paix. »
Pour certain·es participant·es, le risque est parfois de reproduire, et finalement d’imposer, dans les autres pays, la seule manière de faire en France, tant sur les contenus sportifs que sur les modalités d’organisation. Or seule une coopération synonyme de partage permettra de créer de la culture et de la transmission. Yves Renoux, membre de la Direction fédérale collégiale de la FSGT, pointe d’ailleurs cinq indicateurs pour faire converger valeurs et concrétisation dans le cadre du projet de la Fédération : émancipation, puissance d’agir, partage des savoirs, solidarité et faire de la politique autrement.
Un espace de formation citoyenne
Quelles synergies développer entre les partenaires des projets de coopération et de solidarité internationales en France ? Autrement dit : comment profiter de ces actions pour aider au maillage territorial de la FSGT et de sa volonté d’émancipation par le sport ? Les initiatives actuelles aux côtés des collectivités françaises dans le cadre de la coopération décentralisée avec la Palestine, ainsi que les perspectives des 90 ans de la Fédération et des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, nous invitent à développer collectivement des actions qui mettent au cœur le sport populaire et solidaire.
Maud Corso, bénévole au sein de la section foot de l’Entente sportive de Vitry, et Ibrahima Konaté, chargé de missions des relations internationales dans cette commune du Val-de-Marne, expliquent comment est né leur projet de coopération en Palestine avec la FSGT et surtout en quoi il peut être un espace de formation pour les jeunes vitriotes si les contenus sont adaptés. D’où la volonté de s’appuyer sur ce que le club réalise déjà comme support de formation et d’éducation populaire et d’accueillir les Palestiniens dans ce cadre.
Le monde associatif sait à quel point l’international peut-être accélérateur de transmission et d’engagement. Une opportunité selon Jean Jourdan, ancien chercheur universitaire, pour allier contenu politique explicite et action associative et sportive. Adjointe au Maire d’Allonnes (ville sarthoise partenaire de la Fédé sur ses actions en Palestine et jumelée avec le camp de réfugié·es de New Askar), Catherine Bouché confirme :
« Notre coopération donne du sens pour cultiver la paix et organiser un séjour de jeunes. Nous voulons être une ville monde et associer la population aux enjeux d’émancipation des peuples. »
Quel bilan tirer de ces deux journées ? D’emblée, Chloé Guille, chargée de projet au Domaine de la politique de coopération et de solidarité internationales de la FSGT, met en avant la diversité des acteurs et des actrices présent·es : étudiant·es, universitaires, élu·es, partenaires associatifs, militants et militantes du siège fédéral, dans les Comités, des Commissions d’activités ou encore des associations.
Philippe Fenot, évaluateur des actions FSGT en Palestine, souligne le professionnalisme de la FSGT au niveau de la coopération et de la solidarité internationales, mais également le risque d'isomorphisme, au sens de reproduire les dérives de « gestionnarisation » des ONG par exemple. Selon lui, plus la politique est actée, volontaire et définie, plus les initiatives peuvent être ambitieuses et moins on laisse de place au hasard des rencontres et des interstices. Le projet de la Fédération est exceptionnel du point du vue des contenus, des acteur·rices, de la reconnaissance et des perspectives. À nous, collectivement, de continuer à le faire vivre avec ses spécificités, pour donner l’espoir que l’émancipation des peuples, des femmes et des hommes, est possible.
International : de la coopération, mais aussi de la compétition !
La politique internationale est au cœur du projet de la FSGT depuis le départ. Dès 1936, la Fédération s’engage dans la participation aux Olympiades populaires de Barcelone en opposition aux Jeux olympiques de Berlin. De la lutte contre l’Apartheid en Afrique du Sud à celle contre l’armement nucléaire au Japon, en passant par son soutien aux peuples sahraouis et palestiniens, les combats de la FSGT, construits avec ses partenaires, ont marqué son histoire. Mais outre les aspects de coopération et de solidarité, les compétitions et les échanges sportifs internationaux sont également parties prenantes d’un projet fédéral visant à former les citoyens et les citoyennes de demain et à permettre à tous et toutes, quel que soit son niveau, d’accéder à des rencontres dans le monde entier. La Fédération organise ainsi régulièrement des échanges avec d’autres fédérations (comme la Shintairen au Japon), et participe aussi, tous les quatre ans, aux Jeux sportifs mondiaux de la Confédération sportive internationale du travail. Aux côtés des Commissions fédérales d’activités concernées, le Pôle activités et culture sportive internationale, coordonné par Véronique Fatier et Thierry de Lonchamp, préparent actuellement l’organisation du séjour pour la prochaine édition qui est prévue du 5 au 10 septembre 2023 en Italie...
Emmanuelle Bonnet Oulaldj
Comments