Née en 1934, la FSGT fête ses 90 ans cette année ! À cette occasion, Sport et plein air a préparé une série d’articles traitant de son histoire. Dans ce numéro, il est notamment question de la solidarité internationale des sportif·ves dans les années 1970/80…
L’histoire du sport populaire français a débuté dans la matrice partisane et culturelle du mouvement ouvrier. Il en épousa donc longtemps les perspectives, les combats et les divisions, et son regard au-delà des frontières a, en conséquence, été orienté par la recherche d’un internationalisme athlétique, qu’il soit communiste ou réformiste.
Orpheline d’une URSS qui rejoint le CIO et abandonne le rêve d’une alternative à l’olympisme bourgeois, la FSGT adhère, après la Seconde guerre mondiale, à la Confédération sportive internationale du travail (CSIT), réunissant ce qu’il reste des fédérations sportives travaillistes en Europe, tout en entretenant des relations de plus en plus fortes avec les pays du bloc de l’est.
Elle prendra par exemple la défense d'une RDA longtemps exclue de l’arène olympique, tout en fermant les yeux sur le dopage d’État qu'elle organisait. Cette forme de solidarité se manifestera notamment avec la parution d'un Sport et plein air consacré au développement des activités physiques dans ce pays en mai 1973.
Progressivement, l’émergence du tiers-monde dans le concert des nations et le processus de décolonisation, qui s’accélère à partir de la fin des années 1950, décalent politiquement et géographiquement les enjeux. La FSGT repense ainsi les fondements de sa solidarité internationale.
Contre l’apartheid !
L’émancipation des pays du sud peut rentrer en résonnance avec des affinités idéologiques et s’inscrire dans le vaste damier géopolitique de la guerre froide. De la sorte, Roger Fidani, un des dirigeants de la FSGT issu de l’US Ivry (Val-de-Marne), qui s’était retrouvé coincé en 1962 sur l’île de Fidel Castro à l’occasion de la crise des missiles, publie le livre Cuba, sport en révolution en 1975. Toutefois, les fondements des combats attendant la FSGT à partir des années 1970 vont sensiblement évoluer. Elle s’attaque en particulier à l’apartheid en Afrique du Sud, tissant des relations intenses avec les représentants du sport non racial.
Les historiens Adrien Virondeau et Fabien Sabatier, dans un article paru en 2013 dans Cahiers d’histoire, replacent la démarche de la fédération qui « témoigne d’une volonté politique de diffusion internationale des valeurs FSGT et d’accomplissement d’objectifs fixés dans le cadre de sa participation à la CSIT. Elle s’oppose explicitement au racisme d’État sud-africain ». En 1980, le South african council on sports et la fédération signent un accord de coopération, « dont les principales orientations visent à faire connaître en France la réalité du sport non racial, d’obtenir la reconnaissance des droits des sportifs non raciaux, d’élargir les actions de solidarité à leur égard ».
Dans l’Hexagone, la FSGT dénonce la position d'une Fédération française de rugby (FFR) rencontrant régulièrement les Springboks sud-africains, ambassadeurs de luxe d’un régime normalement exclu du cénacle sportif. Il faudra attendre 1981 et l’arrivée de la gauche au pouvoir pour que l’ovalie tricolore soit contrainte de rompre avec le régime de Prétoria. Et ce malgré l'opposition d’Albert Ferrasse, président de la FFR qui, ironie de l’histoire, s’était rendu, en 1936, à l’Olympiada Popular de Barcelone * avec l’Ufolep. Cette campagne est l’occasion pour la FSGT de retrouver François Moncla, figure du rugby français de sensibilité communiste.
Le premier France-Palestine
S’enchaîne ensuite le soutien à la reconnaissance du sport palestinien. Un choix qui n’a rien de simple ni d’évident au début des années 1980, tant la cause palestinienne est réduite à la question du terrorisme. Cette démarche se concrétise en 1982 par une tournée de footballeurs palestiniens en France. En 2015 dans So Foot, Pascal Mesnil, ancien responsable du secteur international de la FSGT et cheville ouvrière de cette première, se remémorait l'ambiance particulière qui régna à l'époque :
« Il y avait des policiers et des CRS partout, dès que l’équipe se déplaçait et évidemment autour du lieu d’hébergement. Des tireurs d’élite sur les toits et tout le tremblement. »
Ce fut également un baptême du feu pour la future coprésidente de la fédération, alors jeune footballeuse, Lydia Martins-Viana. « J’étais une gamine de l’AS Drancy, et je me souviens avoir porté le drapeau olympique devant les deux équipes qui entraient sur le terrain », expliquait-elle dans le même article.
« Je ne mesurais pas trop ce que je vivais. »
Pendant plus de quarante ans, des militant·es vont faire perdurer cette forme singulière d’internationalisme sportif, parfois en coopération avec le Snep-FSU. Une solidarité fondée sur des constructions communes, par exemple le centre socio-sportif Tariq Ben Ziad pour la jeunesse et les familles d’Hébron, des animations au cœur des villes et des quartiers, des formations auprès d'enseignant·es et d'éducateur·rices palestinien·nes, en particulier à destination des femmes…
* Lire Sport et plein air, janvier 2024
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